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La Cène

Du XVe au XVIIe siècles

L’un des plus prestigieux ensembles d’arts décoratifs de la période : mobiliers, céramiques, émaux, orfèvrerie, armes, verrerie, vitraux, peintures et tapisseries, dont l’exceptionnelle tenture de l’Histoire de David et Bethsabée.

Les objets

Tapisserie
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© Rmn/Grand Palais
Jupiter et Latone

Paris, deuxième quart du XVIe siècle

Plusieurs épisodes se succèdent au sein de cette pièce de tapisserie : sous le couvert d’une forêt, Jupiter séduit la nymphe Latone ; devenue enceinte, celle-ci subit la malédiction de Junon, survolant la scène dans son char tiré par des paons, et s’enfuit, pourchassée par le serpent Python sous la forme d’un dragon ; guidée par l’aigle de Jupiter, elle se réfugie sur l’île de Délos. Tout cela est raconté dans le poème français situé dans le cartouche supérieur. Le faux pilastre de la bordure de droite est orné d’emblèmes liés à la déesse Diane et du double delta, monogramme de Diane de Poitiers, destinataire de la tenture d’où est issue cette pièce. Il subsistait, en effet, neuf autres pièces, réparties entre la France et les États-Unis : quatre ont malheureusement disparu dans un incendie il y a quelques années. Vendue à la fin du XVIIe siècle à un aristocrate génois, la tenture ornait très probablement le premier étage du château de Diane de Poitiers à Anet.

Le style de l’oeuvre trahit d’importantes réminiscences d’oeuvres majeures de la Renaissance italienne et française, notamment des gravures d’après Raphaël et Jules Romain ainsi qu’une composition du Primatice pour la porte Dorée de Fontainebleau. Cette multiplicité, présente dans les autres pièces de la tenture, correspond davantage à l’esprit d’un atelier regroupant plusieurs artistes qu’au style personnel du seul Jean Cousin. C’est cependant probablement à ce dernier, documenté pour la conception d’autres tentures de tapisserie depuis l’Histoire de saint Mammès pour la cathédrale de Langres en 1543, qu’il faut en donner l’invention.

Une autre pièce, représentant la Naissance de Diane et Apollon, deuxième épisode de la tenture, est entrée en même temps dans les collections du musée national de la Renaissance.

Tapisserie
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© Rmn/Grand Palais
L'Age viril de l'homme

Florence, vers 1564

Au XVe siècle, les Médicis manifestent un grand intérêt pour les tapisseries, qu’ils achètent massivement dans les Pays-Bas. Soucieux de promouvoir l’industrie florentine, Côme Ier décide en 1545 de fonder une manufacture en Toscane, dirigée par deux liciers flamands. Il confie à l’atelier de Benedetto Squilli le soin de tisser les pièces destinées à orner les murs du Palazzo Vecchio, lieu d’exercice de son pouvoir. Des peintres prestigieux, comme Bronzino, Allori et Stradano, sont sollicités pour fournir des cartons à sujets mythologiques ou religieux, dont la symbolique est subtilement liée à l’histoire des Médicis et à leur idéal de gouvernement.

L’Âge viril, un élément d’un cycle consacré à la Vie de l’homme d’après des dessins de Giovanni Stradano, répond ainsi aux aspirations philosophiques du cénacle humaniste florentin. La scène figure une allégorie de l’Homme, guidé par la Foi tenant un bol pourvu d’ailes (symbole de la vie contemplative et de la vie active) et par l’Innocence (accompagnée d’un angelot) vers la montagne où siège l’illumination divine. La vivacité des couleurs et la richesse de la bordure ornementale en font un superbe exemple de tapisserie maniériste italienne.

Statuette
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© Rmn/Grand Palais
Jupiter au foudre

Venise, vers 1570

Alessandro Vittoria (1525-1608), élève et successeur de Jacopo Sansovino, est l’un des artistes majeurs de la seconde moitié du XVIe siècle à Venise. Célèbre pour ses nombreux bustes aux torses imposants, il exécute également des sujets religieux et mythologiques en pierre et en bronze.

Le Jupiter d’Écouen, qui avait peut-être pour pendant une Junon, présente une image habituelle du dieu tenant son foudre. Son attitude est toutefois bien plus inattendue : malgré la puissante musculature, le déhanché du corps confère à la statue une apparence de légèreté qui éloigne cette représentation des visions monumentales de Jupiter souvent choisies par les sculpteurs. Le paradoxe que constitue cette alliance de force et d’afféterie est caractéristique des débuts de la carrière de Vittoria, largement influencés par l’esthétique maniériste d’artistes tels que Tintoret et Michel-Ange.

Cette oeuvre d’une très haute qualité esthétique, au sujet souvent choisi par des sculpteurs tels que Sansovino, témoigne de la passion des hommes de la Renaissance pour les bronzes, qu’ils soient destinés à figurer dans des cabinets de curiosités ou dans des édifices publics.

Vitrail
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© Rmn/Grand Palais
François Ier en prière

Paris, vers 1555

En 1549, Henri II confia à l’architecte Philibert de L’Orme l’achèvement de la Sainte-Chapelle de Vincennes, où il avait le projet de transférer le siège des cérémonies de l’ordre de Saint-Michel. L’édifice reçut alors un somptueux décor intérieur et les vitraux firent l’objet, de 1551 à 1556, de commandes successives, confiées à Nicolas Beaurain, un maître verrier parisien réputé.

Chaque verrière était divisée en trois niveaux superposés. Le récit de l’Apocalypse en occupait la partie centrale par une succession de tableaux présentés dans des encadrements peints en grisaille. Le haut du fenestrage déclinait avec abondance l’emblématique royale portant les croissants, chiffres et devises associés à Henri II. Les parties basses des verrières étaient réservées, dans le choeur, à des représentations de personnages sacrés et, dans la nef, à des portraits des membres de la famille royale (le roi régnant, son père le roi François Ier, la reine Catherine de Médicis, le dauphin François) et des principaux dignitaires de l’ordre (le cardinal de Lorraine, le duc de Guise et le connétable de Montmorency, gouverneur de Vincennes). Tous étaient représentés agenouillés en prière et à grandeur naturelle, saisissants de vérité. François Ier, tourné vers la gauche en direction du sanctuaire, occupait l’une des verrières droites de la nef.

On considère ce portrait du roi défunt comme l’un des chefs-d’oeuvre de la peinture sur verre de la Renaissance. Nicolas Beaurain y décline sa palette vive et riche en émaux, sa pratique des tailles croisées qui modèlent vigoureusement les visages, son goût pour les textiles et les décors mobiliers. Le peintre verrier signe là un véritable portrait de l’homme âgé, au visage amaigri mais toujours avenant, que François Ier fut sans doute au cours des dernières années de son règne.

Armoire
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© Rmn/Grand Palais
Armoire de Clairvaux

Bourgogne, dernier quart du XVIe siècle

Provenant de l’abbaye de Clairvaux (Aube), cette armoire présente une structure à deux corps typique de la nouvelle conception des meubles de cette époque. La profusion de son décor sculpté, dans la tradition du style de Hugues Sambin, en fait sans conteste l’un des plus beaux meubles conservés de la Renaissance française.

Dès la seconde moitié du XVIe siècle, l’architecture influence la forme des armoires, cabinets, buffets, construits comme de petits « monuments», et le décor des meubles s’italianise. Les motifs ornementaux de cette armoire sont directement inspirés de l’école de Fontainebleau : termes canéphores, dont six aux angles du corps supérieur et un entre les deux vantaux inférieurs - figures utilisées ici comme de purs emblèmes maniéristes -, rinceaux, oiseaux, corbeilles, guirlandes de fruits et de fleurs, palmettes et masques de satyres.

Ce meuble, certainement destiné à abriter les objets précieux du commanditaire, a conservé à l’intérieur du corps supérieur un revêtement de soie verte tendue par des galons dorés, dont les clous à tête ronde sont dorés. Ce revêtement était courant pour les meubles précieux. Ce décor, fragile, a très souvent disparu dans la plupart des armoires conservées.

Statue
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© Rmn/Grand Palais
Génie funéraire

Paris, vers 1558

Ce Génie funéraire constitue la première grande commande documentée de l’un des plus grands sculpteurs de la Renaissance française, Germain Pilon (1540-1590). Formé dans l’atelier de son père, il domine toutes les techniques de la sculpture, tant la terre que le marbre, l’albâtre ou le bronze. Cette dextérité lui vaut d’être nommé contrôleur des Poinçons et Monnaies du roi. En 1558, l’architecte Philibert de L’Orme commande à Pilon « huit figures de fortune » destinées au tombeau de François Ier, pour un montant de 1100 livres. Le marché précise qu’elles doivent être en ronde bosse, en marbre blanc et mesurer environ 3 pieds de haut. En 1559, Primatice prend la direction des travaux et commande huit figures semblables à Ponce Jacquiot pour le même tombeau. La question de leur emplacement dans le projet initial demeure problématique. Il reste donc difficile de préciser si elles devaient constituer l’amortissement des seize colonnes au sommet du monument ou si elles étaient prévues autour du soubassement. Une note de 1572 atteste cependant que ces statues n’ont jamais été mises en place.

Trois de ces génies funéraires, attribués à Ponce Jacquiot, ont été réutilisés pour le monument de coeur de François II à Saint-Denis. Le seul qui soit attribué avec certitude à Germain Pilon se trouve aujourd’hui au musée d’Écouen après être passé par le musée des Monuments français de Lenoir puis par le « chantier » de Saint-Denis avant d’entrer au musée de Cluny en 1881.

L’influence italienne est manifeste dans cette oeuvre : le thème du génie dionysien renversant un flambeau en signe d’extinction de la vie, d’inspiration antique, est très largement repris par les sculpteurs de la Renaissance florentine. Sa pose serpentine rappelle celle de l’Enfant de La Madone de Bruges de Michel-Ange. Enfin, la spirale de drapés chiffonnés, qui accentue son mouvement en contrapposto, le rattache au monde maniériste des stucs de Fontainebleau.

Il y a cependant dans cette représentation enfantine une vérité caractéristique de Pilon. Ce corps de jeune enfant est modelé avec une sensibilité remarquable. La tête penchée, à l’expression soudain grave, paraît saisie sur le vif. L’aptitude du sculpteur à traduire un corps juvénile se vérifie jusque dans ses imperfections, par exemple les bourrelets qui plissent le bas du cou et empâtent les genoux et les chevilles, ou le nez légèrement écrasé entre des joues grasses et tombantes.

Pendant la seconde moitié du XVIe siècle, l’art maniériste s’est pleinement affirmé en France : l’école de Fontainebleau, sous l’autorité du Primatice, a adopté la « manière » italienne. Pourtant, Germain Pilon a su trouver un langage personnel, synthèse du maniérisme transalpin et de l’observation scrupuleuse de la nature.

Cheminée
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© Rmn/Grand Palais
Diane et Actéon

Champagne, vers 1567

Le bas-relief en pierre sculptée qui représente Diane au bain surprise par Actéon provient, d'un hôtel particulier de Châlons-en-Champagne détruit au XIXe siècle, tout comme le manteau, situé à l'autre extrémité de la galerie de Psyché. Il présente simultanément, et en perspective, trois scènes. Au premier plan, Actéon, à gauche, surprend Diane au bain, à droite, entourée de ses suivantes. Puni de son involontaire curiosité, il porte désormais une tête de cerf sur un corps d'homme. Au second plan, il s'enfuit et enfin, dans le lointain, il est à terre, déchiqueté par ses chiens. La composition, d'un travail délicat et fin (on admirera les sinuosités des chevelures des femmes au bain, le tissu moulé par l'eau) mêlent deux styles. Si le bassin, adossé à un décor très classique de pilastres cannelés et de plafond à caissons, relève de l'esprit Renaissance, le bois, par contre, naïvement formé de cinq arbres, rappelle sans faillir les enluminures médiévales. Le sculpteur s'est fidèlement inspiré d'une gravure de Jean Mignon, d'après une oeuvre de Luca Penni.

Tableau
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© Rmn/Grand Palais
L'Adoration des Mages

Anvers, vers 1520

L’Adoration des Mages est l’un des chefs-d’oeuvre de Jan de Beer, peintre représentatif du maniérisme nordique. Ce mouvement artistique se développe durant tout le XVIe siècle, en adoptant diverses tendances : tandis que la première génération d’artistes maniéristes, active vers 1500-1530, est particulièrement sensible aux effets raffinés, aux envols de drapés et aux détails précieux, ses suiveurs adoptent une vision beaucoup plus énergique et des physionomies humaines caractérisées par leur forte musculature. Dans chacune de ces deux aspirations successives, la recherche artistique ne réside plus dans quelque imitation fidèle de la nature, mais dans des considérations purement esthétiques, souvent alliées à des considérations intellectuelles complexes.

Né vers 1475, Jan de Beer adhère en 1504 à la guilde des peintres d’Anvers, dont il est élu doyen en 1515. Souvent sollicité pour l’exécution de décors éphémères, par exemple pour la Joyeuse Entrée de Charles Quint à Anvers en 1515, il est à la tête d’un important atelier où se distingue la figure du Maître d’Amiens. Ce dernier collabore avec De Beer pour un triptyque de l’Adoration des Mages conservé à Milan (Brera), l’un des tableaux servant de référence à l’établissement du corpus de l’artiste. La rareté des oeuvres signées ainsi que certaines incohérences stylistiques incitent toutefois à considérer avec prudence les attributions des peintures émanant du cercle maniériste anversois.

Le tableau d’Écouen, aux caractéristiques très proches de celles du retable de Milan, illustre clairement les spécificités de l’esthétique du maniérisme nordique. Tandis que les bas-reliefs et les candélabres des piliers de l’étable rappellent l’ascendance antiquisante de ce style, les formes tourmentées, les drapés irréalistes ainsi que l’aspect anticonformiste de la colonne centrale illustrent la suprématie d’un climat onirique et raffiné. Cette mise à distance du réel est toutefois tempérée par l’abondance des détails témoignant d’une grande finesse d’analyse, par exemple dans la représentation des pierres et des végétaux au premier plan : largement tributaire des inventions de la Renaissance italienne et du tourment propre à l’esthétique maniériste, ce panneau s’inscrit encore dans la continuité de ses prédécesseurs flamands du XVe siècle, fascinés par les possibilités illusionnistes offertes par la peinture à l’huile.

Corporalier
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© Rmn/Grand Palais
La Déploration du Christ

Paris, vers 1550

Descendu de la Croix (visible à l’arrière-plan), le corps du Christ est déposé sur un linceul par Joseph d’Arimathie et Nicodème; saint Jean, la Vierge et les saintes femmes expriment leur douleur avant d'oindre le corps. Cette broderie orne en fait une boîte, également brodée sur les côtés, destinée à accueillir le linge dont le prêtre enveloppe ses mains pour élever l’hostie, ou corporal.

D’abord donné au Primatice, le modèle graphique utilisé par le brodeur doit plutôt être attribué à Jean Cousin, auteur d’un dessin au style très comparable conservé à la Bibliothèque nationale de France. L’on sait que Jean Cousin et son atelier fournissaient des modèles, ou « patrons », pour des tapisseries comme la tenture de l’Histoire de saint Mammès, mais aussi pour des ornements liturgiques, comme ceux commandés par le chapitre cathédral de Sens mais maintenant perdus.

Le style propre à l’école de Fontainebleau peut ainsi se répandre par le truchement des oeuvres textiles, après une première période où François Ier et Louise de Savoie s’étaient adressés à des artistes italiens ; le règne de Henri II a également vu l'exécution d'exceptionnelles broderies parisiennes à l’or nué, représentant les fêtes de la Cour, maintenant conservées au musée des Tissus de Lyon.

Cabinet
Cabinet vénitien
© Rmn/Grand Palais
Cabinet vénitien

Venise, vers 1550

Le cabinet vénitien est encore un exemple, et des plus somptueux, du compagnonnage très étroit qui se crée au XVIe siècle entre le mobilier et l'architecture. Sa composition évoque irrésistiblement Palladio et particulièrement son théâtre olympique de Vicence. D'autant que les innombrables arcatures bordées de balustrades encadrent des scènes peintes sur nacre, semblables à des petites fenêtres nous dévoilant la vie animée et colorée d'un monde inconnu. Ces façades en étages sont ponctuées de niches à fond bleu, ornées de statues en métal doré. Au centre, une sorte d'abside est surmontée d'une demi-coupole. Ce joyeux foisonnement recèle des dizaines de tiroirs miniatures, qu'on ouvre en tirant sur de petits anneaux fixés à des mufles de lions. Le tout est entièrement recouvert de plaquettes de nacre peintes d'arabesques d'or et de fleurs de couleur. Le cabinet, dépositaire des objets précieux, est lui-même devenu un bijou.

Miniature
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© Rmn/Grand Palais
Le mois d'Août

France, vers 1545

Le livre d'heures est un recueil de prières quotidiennes dont le décor suit une thématique très codifiée. Ainsi, son calendrier est illustré avec les travaux des mois comme ici le mois d'août par la moisson. Pour les familles régnantes ou très riches, le livre d'heures peint à la main est un accessoire de luxe qu'on réserve souvent à la dévotion privée et dont on protège la valeur, ne le montrant qu'aux invités de marque. Celui de Claude Gouffier, fait assez rare, est en français (avec le texte latin en regard). Probablement à cause de sa riche reliure, l'ouvrage a malheureusement été dépecé et il ne reste plus aujourd'hui que huit miniatures dans le manuscrit conservé à New York et cinq feuillets découpés dont celui que possède Écouen.

Cabinet
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© Rmn/Grand Palais
Cabinet en maroquin

Paris, vers 1630

Les premières décennies du XVIIe siècle voient l’émergence d’un nouveau type de meuble, le cabinet. Destiné à s’appuyer contre un mur, il était composé de deux éléments autonomes et superposés : la partie supérieure, garnie d’une corniche, s’ouvrait à deux vantaux sur des séries de tiroirs et un compartiment central à niche et tiroirs protégé par de petits vantaux intérieurs ; le support, en forme de table à ceinture garnie de larges tabliers, est porté sur huit ou douze colonnes ou pilastres plus ou moins ornés, reposant sur des traverses et sur des pieds en forme de boules. L’exemplaire du musée national de la Renaissance se distingue de cette typologie générale à plus d’un titre. Aucune niche n’est cachée derrière les deux vantaux, mais une double série de trois tiroirs surmontant un large tiroir plat et, à la ceinture de la table, deux tiroirs aux façades légèrement biseautées. Plus qu’un meuble de présentation et d’apparat, ce cabinet était donc conçu comme un meuble de rangement et servait en priorité à « serrer » des documents dans ses « layettes ». Sa légèreté relative n’excluait pas d’éventuels transports, facilités par des poignées latérales encore présentes.

Mais c’est surtout son exceptionnel décor, sans aucun équivalent connu, qui justifie sa présence au sein des collections nationales. Toutes les surfaces du cabinet, de la corniche aux traverses des pieds, sont entièrement revêtues de maroquin rouge doré aux petits fers et mosaïqué de cuir brun, olive et orange. L’ensemble forme de grandes compositions géométriques et symétriques de bandes entrelacées inspirées des ornements en mauresques, dont les motifs en mandorles, losanges, triangles rectangles, étoiles, fleurs, cercles, dentelles et frises variées sont créés par la juxtaposition d’une multitude d’infimes ornements dorés aux petits fers. Le meuble lui-même a été taillé en prévision de son magnifique décor : la découpe du tablier du support se conforme au dessin des cuirs dorés qui le recouvrent. Ces techniques particulières relèvent de l’art d’un doreur ou d’un relieur particulièrement expert. L’esthétique précieuse et légère du décor peut indiquer un commanditaire féminin, mais l’usage précis de ce meuble à archives, ancêtre des cartonniers, peut tout autant orienter les hypothèses vers la commande d’un grand serviteur de l’État.

Statuette
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© Rmn/Grand Palais
Faune et faunesse

Padoue, entre 1524 et 1530

L'attribution à un artiste déterminé de ce groupe de bronze a connu des errements. Il faut aujourd'hui rendre ce couple de satyres lubriques à un bronzier padouan renommé, Andrea Riccio. Les marques indubitables du style de l'artiste se retrouvent en effet dans le buste un peu voûté et les épaules portées en avant du satyre, son profil aquilin, son cou épais, son crâne rond, et, sur le pur plan technique, dans le martelage au poinçon fin de toutes les parties de son corps. Dans ce dernier détail, il faut même voir la preuve que c'est le maître-sculpteur lui-même qui a signé l'oeuvre, lui apportant jusqu'à sa finition.

La raison d'être de la représentation de cette étreinte reste cependant relativement inexpliquée. Si un tel sujet érotique n'est pas rare dans les arts graphiques, on peut affirmer que le groupe de Riccio, non seulement est unique dans son œuvre, mais aussi dans la sculpture de son temps. Certes, il faut compter avec le goût du sculpteur, formé dans le sillage de Mantegna, pour l'Antiquité gaillarde et fantasque, teintée d'une belle poésie. Néanmoins pour qu'un tel bronze soit conçu, il a fallu qu'un collectionneur féru d'antiquités et de scènes de genre en passât la commande. Il s'agissait peut-être d'un amateur de céramiques grecques, se remémorant de tels sujets dans la peinture des vases. Cependant le choix de la position singulière des satyres fait immanquablement penser à une gravure de la suite pornographique des Modi, exécutée par Marc-Antoine Raimondi, d'après un dessin de Jules Romain en 1524 et qui connut à sa publication un très grand succès. Étant donné que Riccio devait mourir en 1532, il faut donc voir là une oeuvre de la toute dernière partie de sa vie.

On peut signaler que ce couple de satyres a traversé les siècle de façon singulière. Acquis pour le Musée de Cluny en 1858 par Edmond du Sommerard, la statuette longtemps reléguée dans les réserves du Musée, est alors un groupe formé de trois satyres, deux faunes penchés dans une attitude incompréhensible autour d'une faunesse assise sur une chaise. Il fait alors l'objet d'une étude de Bertrand Jestaz. On s'aperçoit que l'un des faunes n'appartient pas à l'ensemble, sa patine étant très distincte. Il faut alors démonter le tout et remonter le faune de droite et la faunesse dans une position lubrique qui apparaît comme exactement adaptée à leurs figures. Le second faune (aujourd'hui également conservé à Écouen) s'avère être une pièce d'un alliage différent, probablement issue de l'atelier de Riccio, sans être forcément autographe, et rajoutée ultérieurement.

Tableau
La Cène
© RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d'Écouen) / Gérard Blot
La Cène

Vers 1506

Cette copie de l’oeuvre de Léonard de Vinci à Milan est un des tous premiers témoignages de l’engouement des français pour ce chef d'œuvre de l’art de la Renaissance italienne. Commanditée par Gabriel Gouffier (doyen du chapitre de la cathédrale de Sens) dont elle porte les armoiries, elle est sans doute offerte au Cardinal d'Amboise pour son château de Gaillon. En 1555, Anne de Montmorency l'acquiert pour sa chapelle du château d'Écouen où elle reste accrochée jusqu'en 1793. François Ier possédait une tapisserie de la Cène, maintenant au Vatican.

Tapisserie
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Tenture de David et Bethsabée

Bruxelles, entre 1520 et 1525

Exécutée par des ateliers bruxellois dans les années 1525, la tenture de David et Bethsabée est reconnue comme l’un des chefs-d’oeuvre de l’art de la tapisserie au XVIe siècle. Elle égale par la préciosité des matériaux employés, sa qualité d’exécution et son admirable état de conservation L’Apocalypse d’Angers (XIVe siècle), La Dame à la Licorne (XVe siècle) ou encore Les Chasses de Maximilien (XVIe siècle).

Avec ses dix pièces rassemblant près de six cents personnages sur soixante-quinze mètres de long, cette tenture illustre le récit biblique du Second Livre de Samuel. En pleine guerre contre les Ammonites, le roi David s’éprend de Bethsabée alors que sa femme Michol est frappée de stérilité  ; de cette relation adultère s'annonce une descendance. David envoie alors Urie, l'époux de Bethsabée, en première ligne du front, où il trouve la mort. La colère divine s'abat sur le couple et l'enfant décède. Après une période de repentance, le souverain pardonné remporte la victoire et épouse Bethsabée. De son union avec Bethsabée légitimée par Dieu naîtra Salomon, grand roi d’Israël.

L’histoire est transposée dans le cadre de vie du XVIe siècle, offrant une multitude de détails sur la vie de la cour à la Renaissance (costumes, apparat et cérémonial royal, art de la guerre). Le nom de l’artiste qui en a élaboré les cartons demeure inconnu. Il pourrait toutefois s’agir du peintre flamand Jan van Roome, dit Jean de Bruxelles, artiste en vogue à la cour de Marguerite d’Autriche, tante de Charles Quint. Jan van Roome dessine en 1513 le tombeau de son époux Philibert de Savoie à Brou, dont les statuettes s’apparentent de très près aux figures de la tapisserie. D’ailleurs, le nom le plus fréquemment suggéré lorsqu’on tente de considérer le commanditaire de cette oeuvre qui ne porte aucune armoirie est celui de Marguerite d’Autriche. Deux indices viennent conforter cette hypothèse : le motif héraldique du « A » sur le cheval porte-étendard de la troisième pièce, pouvant évoquer Austria, et l’architecture du palais de la quatrième pièce, qui est à rapprocher de la cour du palais ducal de Bruxelles, dont il avait dessiné la clôture.

Si Marguerite d’Autriche a commandité cette oeuvre, il semblerait qu’elle l’ait revendue avant sa mort, survenue en 1530. En effet, l’inventaire de 1547 du roi Henri VIII d’Angleterre signale l’achat en 1528 à un marchand flamand d’une tenture en dix pièces représentant « la riche histoire du roi David », aux dimensions similaires à celles de la tenture du musée national de la Renaissance.

Cette tenture met en scène l’orgueil et l’affront du roi David envers le pouvoir divin autant que le pardon et le consentement de Dieu. Il est donc aisé de comprendre la valeur qu’Henri VIII pouvait accorder à ce récit, dans un contexte où il cherchait à faire accepter par le pape son divorce avec Catherine d’Aragon - qui ne lui donnait pas d’enfant - et l’effet que pouvaient produire ces tapisseries sur les princes et ambassadeurs italiens lorsqu’elles étaient déployées durant les cérémonies du glorieux souverain.

 

Cette oeuvre n'est actuellement pas exposée pour des raisons de conservation.

Coupe
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© Rmn/Grand Palais
Coupe aux armes d'Anne de Bretagne

Venise, entre 1498 et 1514

Au XVe siècle, servis par une tradition séculaire d’échanges commerciaux avec l’Orient méditerranéen, les verriers vénitiens mirent au point une nouvelle composition du verre fondée sur une sélection de matières très pures aptes à produire un verre d’une transparence jamais atteinte (d’où son nom de cristallo, en référence au cristal de roche). Les souffleurs de verre de Murano, en travaillant longuement le verre à chaud et en s’aidant de moules, obtenaient des formes particulièrement complexes et une belle variété de couleurs qui situaient leurs verres au rang d’une production raffinée et recherchée.

La coupe du musée de la Renaissance illustre parfaitement ce que fut ce verre de prestige et non d’usage, que l’on exposait sur un dressoir. Sa silhouette en forme de tazza s’enrichit d’un noeud mouluré et d’une coupe à godrons qui l’apparentent à l’orfèvrerie française.

Comme toute vaisselle ostentatoire, ces verres vénitiens portaient les armoiries de leur possesseur : ici, l’écu émaillé mi-parti de Bretagne et de France surmonté d’une couronne désigne Anne de Bretagne, deux fois reine de France pour avoir épousé successivement Charles VIII et Louis XII, ce qui confère à la coupe une datation antérieure à 1514, année de la mort de la reine.

La coupe d’Anne de Bretagne fit sans doute l’objet d’une commande exceptionnelle, honorée par les verriers vénitiens à l’occasion d’un événement particulier : couches de la reine, Joyeuse Entrée, étrennes ? D’autres pièces également conservées prouvent qu’il s’agit d’un véritable service, peut-être celui « doré par les bords » décrit dans les inventaires royaux. C’est le cas en effet de notre coupe, qui joint à la vive polychromie de ses armoiries rehaussées d’or, élégamment présentées entre deux rubans vermeil, des touches d’or soulignant les bords et les moulures du pied et les godrons de la coupe.

Email
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© © Rmn/Grand Palais
Jupiter

Limoges, 1559

On sait peu de choses de Pierre Courteys (mort en 1581) dont les premières œuvres sont datées de 1544. Il fut peut-être formé dans l'atelier de Pierre Reymond, autre émailleur de Limoges. Il a su donner à ce Jupiter monumental, inspiré d'un dessin de Rosso Fiorentino gravé par Jacopo Caraglio, une vigueur qui lui appartient en propre : la figure, assez massive, aux muscles saillants, aux avant-bras nus prêts à livrer bataille, séduit par sa force et son dynamisme. Son costume est celui d'un homme de guerre mais n'abandonne pas pour autant toute prétention à l'élégance : si elle est doublée d'un tablier de cuir, la tunique est néanmoins brodée de mauresques d'or. Cette plaque ovale monumentale, dont les dimensions montrent assez le degré de perfection auquel est parvenu l'art de l'émail, fait partie d'un ensemble de neuf, représentant six dieux olympiens (Jupiter, Saturne, Apollon, Mercure, Mars, Hercule) et trois vertus (la Justice, la Charité, la Prudence). Ces neuf plaques ne forment sans doute pas la série complète qu'il est tentant d'interpréter comme une commande royale dont la mort accidentelle d'Henri II en juillet 1559, aurait interrompu la réalisation. D'un grand raffinement technique, combinant les effets de relief et de la couleur, ces plaques étaient faites pour être accrochées à une certaine hauteur, probablement dans une grande salle palatiale, peut-être insérées dans un lambris. Un peu plus tôt, Pierre Courteys avait exécuté pour Anne de Montmonrency une grande plaque émaillée, également en bosse, représentant la Mort de Laocoon : elle est maintenant conservée au musée des Beaux-Arts de Limoges.

Cuir peint
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© Rmn/Grand Palais
Marcus Curtius

Amsterdam, dernier quart du XVIIe siècle

Dans le cadre des travaux de façades de la cour d'honneur du château, la salle exposant cette oeuvre est actuellemen fermée au public.

Cette suite de panneaux de cuirs peints provient d’un appartement de l’hôtel d’Étancourt, situé rue du Gros-Horloge à Rouen. Elle constitue l’un des plus beaux exemples conservés en France de cuirs peints, une technique souvent employée pour décorer les murs des riches maisons bourgeoises dans la seconde moitié du XVIe et au XVIIe siècle. La fragilité de ce matériau explique toutefois que les tentures de cuir aient été mal conservées : la richesse décorative et l’intérêt iconographique de ce cycle ne font qu’en accroître l’importance.

Les personnages représentés sur cet ensemble sont directement inspirés de gravures exécutées par le peintre flamand Hendrick Goltzius, dont les nombreuses estampes ont une influence considérable sur l’ensemble de la production artistique de la fin du XVIe siècle. Les sujets, tirés d’une série consacrée aux héros de l’histoire romaine, devaient fournir au spectateur un exemple édifiant d’abnégation en même temps qu’ils devaient garantir la magnanimité et le courage de leur propriétaire. L’allégorie de Rome, au centre, est précédée par Titus Manlius, repoussant les Gaulois qui avaient surpris le Capitole, Horatius Coclès, défendant seul contre Porsenna le pont Sublicius avant de se jeter à l’eau, et Manlius Torquatus, battant en combat singulier un Gaulois géant. Elle est suivie de Mucius Scaevola, mettant sa main droite dans un brasier ardent sur l’ordre de Porsenna, de Marcus Calpurnius, sauvant l’armée romaine en détournant l’attention des Carthaginois sur sa petite troupe, puis de Marcus Curtius, se précipitant avec ses armes et son cheval dans un gouffre qui se ferme derrière lui.

Il est possible que trois autres pièces, figurant les derniers épisodes représentés dans le cycle de Goltzius, aient été perdues.

L’utilisation de modèles nordiques est un indice supplémentaire pour considérer cet ensemble comme une production originaire d’Amsterdam, concurrençant les cuirs dorés exécutés en grande quantité en Espagne. La provenance de cette pièce prestigieuse confirme également la place fondamentale de Rouen dans la Renaissance française, au confluent des influences italiennes et flamandes.

Cassone
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© Rmn/Grand Palais
Tiberius Gracchus et Cornélie

Florence, vers 1465 - 1470

Apparus dès la fin du XIVe siècle dans les Républiques de Florence et de Sienne, les cassoni sont des coffres de mariage fabriqués par paire, offerts à la mariée pour qu’elle y range son trousseau. Une fois placés dans la chambre, ils avaient d’abord une fonction d’usage.

Remarquables par leur décor peint et leur iconographie souvent inédite, ces cassoni étaient généralement fabriqués par des artistes renommés. Peu nous sont parvenus dans leur état d’origine. Dès le XIXe siècle, en effet, les panneaux peints étaient détachés des coffres et présentés comme des tableaux par les collectionneurs et les marchands.

L’histoire est divisée en trois parties, avec une lecture de gauche à  droite : le moment où Cornélie quitte la maison paternelle pour celle de son époux, puis le récit de Tibère à propos des deux serpents, symbolisant les deux époux, enfin le sacrifice de Tibère, qui meurt en tuant le serpent mâle. Ce thème, tiré des Vies parallèles de Plutarque, exalte les vertus du mariage et de la famille, montrant à la jeune épousée le modèle de la matrone romaine exemplaire, Cornélie, qui sut élever seule ses fils, les Gracques, célèbres tribuns romains. Les éléments d’architecture, comme les groupes de personnages, font la transition entre les épisodes de l’histoire : la façade de l’église située entre les deux scènes à gauche évoque celle de San Miniato à Florence – qui inspira Alberti pour la façade de Santa Maria Novella à Florence, achevée en 1470. La colonne Trajane, derrière l’église, rappelle que les protagonistes sont romains.

Ce panneau appartient à une paire, où le second devant de coffre représente l’histoire d’Antiochus et Stratonice (E.Cl. 1744), tirée de Plutarque, exaltant aussi le thème du renoncement par amour.

Le musée national de la Renaissance présente quinze panneaux peints dont douze issus de la prestigieuse collection du marquis Campana - et huit panneaux attribués à Giovanni di Ser Giovanni (1406-1486) et à son atelier. La fin de la carrière du Scheggia est marquée par la collaboration avec son fils Antonfrancesco di Giovanni, dont la main semble perceptible sur ce panneau.

Horloge
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© Rmn/Grand Palais
Nef automate dite "de Charles Quint"

Allemagne, dernier quart du XVIe siècle

Les empereurs allemands ont accueilli et soutenu une pléiade de savants, mathématiciens et astronomes dont les découvertes donnaient lieu à la fabrication de prototypes destinés à leurs collections de scientifica. En marge de ces travaux est développé le goût pour de savants automates dont la ville d'Augsbourg se fit la spécialiste grâce aux talents réunis de ses horlogers et de ses orfèvres.

La nef du musée national de la Renaissance est l’un des automates de table les plus élaborés qui nous soient parvenus. C’est un galion à trois mâts, armé de canons dont l’un se cache dans la figure de proue en forme de dragon. Sa vaste coque en laiton doré est ciselée d’ornements et, sous la ligne de flottaison, de monstres marins émergeant des flots. Sur le pont, l’empereur Charles Quint trône sous un baldaquin, devant lui défilent trois hérauts suivis par le cortège huit princes électeurs reconnaissables à leur bonnet d’hermine ; dix trompettes, un tambour et un timbalier forment une haie ; des marins postés sur les hunes et le pont observent la fanfare. La coque du navire ne dissimule pas moins de sept mouvements qui commandent le cadran au pied du grand mât, déclenchent la sonnerie des heures et des quarts et animent les bras des marins situés sur le mât. Des mécanismes musicaux actionnent les trompettistes et le timbalier, provoquant la rotation de la plateforme des électeurs, le salut de chacun d’eux devant l’empereur et le mouvement du bras de celui-ci.

L’un des mystères de la nef est d’être anonyme et sans provenance avérée. On attribue son invention à l’horloger Hans Schlottheim (1544/1547 - 1626), qui travailla pour les ducs de Bavière et séjourna à la cour impériale de Prague en 1586-1587, puis à celle de Saxe en 1589 et 1593. Des « galères artistiques » de Schlottheim figuraient autrefois dans les collections de Rodolphe II. Cette nef, qui célèbre la puissance navale et politique de l’empereur Charles Quint, était peut-être l’une d’elles.

 

Nef de Charles Quint par musee-renaissance

 

 

Cette oeuvre n'est actuellement pas exposée pour des raisons de conservation.

Statuette
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© Rmn/Grand Palais
Statuette de Daphné

Nuremberg, 1570 - 1575

La statuette est portée par une base circulaire où sont appliqués des têtes d’anges et des mufles de lion disposés en alternance, et un sillon concentrique dans lequel ont été fixés des fragments de roches métamorphiques composées de quartz et de sulfures. La figure de Daphné s’y tient debout, la jambe droite fléchie et placée légèrement en avant, vêtue d’une robe drapée découvrant la cuisse et la jambe droite ainsi que le bout du pied gauche. Les chairs sont en argent blanc, tandis que les vêtements et les cheveux ont été dorés. C’est à la ceinture, ornée de motifs inspirés de la joaillerie, que s’ouvre la statuette, dont la partie inférieure, dotée d’un large bandeau interne, s’emboîte dans la partie supérieure. Le buste est revêtu d’un corsage loin du cou, orné d’une tête d’ange. Les manches courtes et plissées resserrées par un ruban dégagent largement les bras. Les avant-bras sont levés à la verticale de part et d’autre du visage et s’interrompent aux poignets où sont fixées des branches de corail. La tête est légèrement inclinée vers la gauche, le regard est orienté dans la même direction, vers le bras gauche et sa ramure de corail. Ce visage élégant aux traits classiques, au nez droit, porte une expression de douceur résignée, sinon de mélancolie. Les lobes des oreilles portent la trace de boucles d’oreilles disparues, les cheveux dorés, ornés d’un bijou au-dessus du front, sont ramenés sur le haut de la tête dont le crâne est évidé pour recevoir la principale branche de corail. L’ensemble a été consolidé par douze bagues en argent de facture sommaire où sont sertis, dans des bâtes, des cabochons de grenats et de turquoises. Huit délicats rameaux de feuillages de laurier en argent peint en vert et verni, fixés aux extrémités de certaines branches sont tout ce qui reste des feuillages d’origine.

Dans les Métamorphoses, Ovide fit le récit de l’histoire de la nymphe Daphné qui, pour fuir les ardeurs d’Apollon, fut par la volonté de son père métamorphosée en laurier. La statuette d’argent et de corail la présente pétrifiée, saisie à l’instant même de sa métamorphose végétale. Cette vision dramatique et saisissante, qui mêle avec audace la référence à la statuaire antique et l’exotisme du monde marin des antipodes, fut imaginée dans l’atelier de Wenzel Jamnitzer, le plus grand orfèvre de Nuremberg (1507/08-1585). Il en existe une version plus tardive, reprise par Abraham Jamnitzer, fils de Wenzel, d’après les modèles de son père, qui faisait partie des anciennes collections des Electeurs de Saxe, aujourd’hui au musée de la Grüne Gewolbe de Dresde.

Pour sa Daphné, Jamnitzer poussa à l’extrême l’interprétation plastique du vase à boire anthropomorphe qui était fréquente au sein de l’orfèvrerie germanique, mais dont l’usage, ici, est sans objet. Quelle était en effet la véritable fonction de la Daphné ? Longtemps la présence du corail, auquel les contemporains de Jamnitzer prêtaient des vertus prophylactiques, a porté à interpréter la statuette comme un « languier », l’un de ces ustensiles de la table médiévale construit comme un arbre à multiples branches où l’on suspendait des « langues de serpent » (dents de requin fossilisées) réputées capables de détecter le poison. Mais cette hypothèse est infirmée par le plus ancien inventaire du Kunstkammer (cabinet de curiosités) de Saxe (1587) où la Daphné d’Abraham Jamnitzer est seulement décrite comme une « figure de jeune femme portant une grande branche de corail ». Peut-être la Daphné avait-elle la vocation d’orner le centre d’une table ou, plus vraisemblablement, d’enrichir les armoires du Kunstkammer d’un prince allemand collectionneur et amateur de naturalia. En effet, loin de s’en tenir à la narration de la métamorphose de la nymphe, Jamnitzer a privilégié pour sa Daphné l’évocation des mutations naturelles de la Nature : c’est ainsi qu’il faut comprendre son choix des roches métamorphiques du socle et des ramures de corail, que ses contemporains considéraient comme une espèce étrange, ni tout à fait végétale, ni tout à fait minérale. Par ce discours, au-delà de l’évocation de la métamorphose mythologique, il rejoignait les préoccupations des savants de son temps qui s’efforçaient alors d’identifier et de classer toutes les espèces naturelles. Ce corail rouge, pêché en grande profondeur en Méditerranée, notamment sur les côtes de Sicile dans la région de Trapani, a donné lieu à la Renaissance à de nombreuses créations artistiques. Nul doute qu'une si grande ramure de corail, à la fois rare et coûteuse, était à elle seule considérée comme l'un des mirabilia les plus recherchés par les collectionneurs.

Cabinet
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© Rmn/Grand Palais
Cabinet Farnèse

Italie, vers 1578

Le cabinet apparaît durant le dernier quart du XVIe siècle. À l’origine conçu comme une écritoire pourvue de compartiments destinés à abriter des lettres ou des documents, il est muni de poignées latérales permettant de le transporter et de le poser sur une table. La façade de ce cabinet aux dimensions monumentales, conçue comme celle d’un palais, est soulignée par la simplicité et la pureté des lignes. Le soubassement à trois vantaux, restauré ou reconstitué au XVIIIe siècle, est scandé par quatre harpies, créatures mythologiques à tête de femme et à serres d’aigle. La partie haute s’organise autour d’un arc de triomphe, flanqué de colonnes et de pilastres corinthiens sur deux niveaux. Une corniche plate, en saillie, couronne le meuble. Les armes du cardinal Alexandre Farnèse (mort en 1589) ornent le tympan de l’arche centrale : deux figures sculptées, vêtues à l’antique, soutiennent le blason coiffé d’un chapeau de cardinal. Des lis héraldiques surmontent chaque fronton brisé.

L’architecture des années 1580 a fortement influencé ce cabinet italien, qui provient probablement du palais du prélat à Rome, où l’on retrouve le même style puissant et sobre. Si l’on se réfère à l’inventaire du palais dressé en 1644, le cabinet contenait une importante collection demonnaies, gemmes et pierres dures, intailles, statuettes, objets antiques, bronzes, plus de 600 desssins ainsi que des manuscrits à miniatures. Chef-d'oeuvre mobilier, ce médaillier éait donc le monumental écrin des collections précieuses du cardinal Farnèse. 

Bronze doré
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© RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d'Écouen) / Gérard Blot
Étriers de François Ier

France, XVIème siècle

Paire d'étriers de François Ier.

 

Cette oeuvre est actuellement en prêt.

Bois et fer
Dressoir de Joinville
© RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d'Écouen) / Martine Beck-Coppola
Dressoir de Joinville

France, 1524

Permet d’évoquer Claude de Lorraine commanditaire de l’œuvre pour son château du Grand Jardin à Joinville. Lorsque François Ier accède au trône en 1515, Claude de Lorraine est nommé échanson du roi et entre dans son conseil. Lorsque le roi décide de partir en campagne en Italie, il s'adjoint les services de Claude, ainsi que de ses frères Antoine, duc de Lorraine et Jean, cardinal évêque de Metz. Ils participeront ainsi à la bataille de Marignan. Lors de cette fameuse bataille, Claude se conduit en héros et est grièvement blessé. En 1524 il est nommé gouverneur de Champagne. À la suite de la bataille de Pavie en 1525, François Ier est fait prisonnier ; pendant sa captivité, plusieurs personnalités se partagent le pouvoir, et Claude est conseiller militaire de Louise de Savoie, régente de France.

Tapisserie
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© Rmn/Grand Palais
Tenture de l'Arsenal : Apollon

France, Paris (?), avant 1634

Cette œuvre fait partie de la tenture dite de l’Arsenal comportant quatre pièces composées selon le même schéma : un personnage mythologique (Apollon, Vénus, Junon et Saturne) au centre, sous une arcature de branches d'olivier, entouré d'animaux divers, domestiques et sauvages, exotiques ou mythiques. L’inventaire du mobilier de Sully, dans ses appartements de l’Arsenal, dressé en 1634, signale une tenture d’une facture exceptionnelle, puisqu’elle était brodée et non tissée et s’harmonisait avec le lit et les sièges. Les quatre pièces conservées au musée national de la Renaissance proviennent de cet ensemble de sept. Dans les angles supérieurs se trouvent les blasons, emblèmes et devises relatifs aux Sully-Bethune et à leurs alliés. Les angles inférieurs sont ornés de vases d'orfèvrerie chargés de fleurs et de fruits. Les bordures sont entièrement couvertes de boulets, canons, tonneaux de poudre, fascines et faisceaux d'armes qui sont les attributs du grand maître de l’artillerie, charge détenue par Sully à cette époque. La technique de broderie de l'or nué consiste à lancer sur une couche d'or des fils de soie polychromes, de façon à laisser entrevoir l'or par intervalle. Elle est majoritairement utilisée par les brodeurs pour les chasubles de l'Église. Sa subtilité et sa magnificence indiquent qu'au XVIe siècle, Paris tient une place de premier plan dans l’art de la broderie. Ici, les points plat, chaînette, cordonnet ont été appliqués sur du satin blanc pour le centre, vert pour les bordures.

 

Sur la pièce présentée figure Apollon, sous les traits d’Henri IV, couronné de lauriers et auréolé de rayons, tenant la lyre. Sur les autres, Junon apparaît sous les traits de Marie de Médicis tenant le sceptre et accompagnée du paon, Saturne, qui pourrait évoquer Sully, tenant d’une main son enfant Jupiter et de l’autre la faux du Temps, enfin Vénus, sous les traits de Rachel de Cochefilet (seconde épouse de Sully en 1592), sur la coquille marine. Cette iconographie glorifie le commanditaire, officier de la Couronne, et son dévouement au roi de France Henri IV en associant leurs images respectives et celles de leur épouses à des divinités antiques.

Décor intérieur
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© Rmn/Grand Palais
Le tribut de César

France, vers 1550

Le Tribut de César est la seule scène tirée du Nouveau Testament ornant les cheminées du château d'Écouen. Il s'agit de l'épisode au cours duquel le Christ préconise de « rendre à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César » (cet épisode est raconté par trois évangélistes : Luc, 20, 20-26 ; Marc, 12, 13-17 ; Matthieu, 22, 15-22). Dans un médaillon ovale, la scène montre au premier plan le Christ nimbé et vêtu de pourpre, entouré d'un groupe de Pharisiens dans une clairière, proche de frondaisons. À l'arrière-plan, une étendue d'eau baigne une ville médiévale, adossée à un mystérieux horizon de montagnes bleutées. Le sujet semble prétexte à la représentation d'un paysage rappelant la peinture du nord ou encore celle de Niccolo dell'Abate qui œuvra au château de Fontainebleau. L'irrésistible déroulement du temps est évoqué à travers une représentation fantastique des feuillages. L'arbre de gauche vit en hiver, tandis que son voisin du centre s'épanouit au printemps et que le dernier, à droite, connaît l'été. Une place primordiale revient incontestablement aux ornements qui se détachent sur un fond en trompe l'œil imitant les mosaïques d'or. Au milieu d'une profusion de fruits, de fleurs, de cuirs découpés entrelacés, de putti, de palmes et de couronnes, triomphe un faune soufflant dans une double trompe. Ce répertoire décoratif traité en grisaille évoque celui de la galerie François Ier à Fontainebleau et de Rosso Fiorentino.

Décor intérieur
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Saül dépeçant les bœufs

France, vers 1550

L'épisode de Saül dépeçant les bœufs devant les envoyés de Yabech en Galaad venus demander du secours est tiré de l'Ancien Testament (premier livre de Samuel 11, 1-8). Saül, apparaît deux fois dans le décor d'Écouen. Une fois sur la cheminée d'une salle située au premier étage du pavillon nord-est du château (salle des broderies de l'Arsenal) et ici, dans la chambre réservée au roi Henri II qui vint deux fois à Écouen, en 1549 et 1553. On y voit Saül étreignant un bœuf d'une main et l'égorgeant de l'autre. Ce faisant, il dirige ses regards vers un guerrier casqué qui brandit, à droite, un glaive nu au dessus de sa tête. Accompagné d'un groupe de soldats aux tenues chamarrées, campés à l'orée d'un bois, il semble faire partie d'une armée dont on conçoit les mouvements à l'arrière-plan, tandis que dans le lointain s'élève une ville fantastique adossée à des montagnes. Ce vigoureux dessin central est encadré par deux solides figures de Mars et Minerve, cuirassées d'azur, de rose et d'or, casquées, cimeterre et lance au poing, qui protègent le croissant d'Henri II tenu en gloire par des chérubins. La partie inférieure a été modifiée par l'insertion du chambranle en marbre sarrancolin offerte par le cardinal Farnèse en 1557.

Décor intérieur
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© Rmn/Grand Palais
La chasse d'Esaü

France, vers 1550

Les deux cheminées de la chambre du Connétable sont ornées de scènes de l'histoire de Jacob. D'une part, dans un paysage pittoresque est représenté Esaü à la chasse (Genèse, 27, 3-5), dont l'identité est garantie par le petit cartouche rectangulaire orné de la Bénédiction de Jacob (Genèse, 27, 6-29) d'autre part, Jacob gardant les troupeaux de Laban et dans le petit cartouche L'Échelle de Jacob. L'histoire de Jacob correspond à merveille à celle d'Anne de Montmorency : cadet et fils de cadet qui par un concours de circonstances favorables se trouva à la tête de son illustre famille. Après avoir occupé les plus hautes charges sous le règne de François Ier, il fut disgracié à partir de 1541 et, comme Jacob, mit à profit son éloignement pour accroître sa fortune terrienne. La réconciliation avec Esaü pourrait symboliser la faveur royale retrouvée sous Henri II, en 1547. Le médaillon central peint comme un cadre ovale en trompe l'œil fait la part belle au paysage ; il se détache sur le fond d'or imitant les mosaïques récurrent sur les douze cheminées du château et entre deux figures tenant chacune l'épée de Connétable d'Anne de Montmorency et soulevant des rideaux ornés des alérions de son emblématique.