Exécutée par des ateliers bruxellois dans les années 1525, la tenture de David et Bethsabée est reconnue comme l’un des chefs-d’oeuvre de l’art de la tapisserie au XVIe siècle. Elle égale par la préciosité des matériaux employés, sa qualité d’exécution et son admirable état de conservation L’Apocalypse d’Angers (XIVe siècle), La Dame à la Licorne (XVe siècle) ou encore Les Chasses de Maximilien (XVIe siècle).
Avec ses dix pièces rassemblant près de six cents personnages sur soixante-quinze mètres de long, cette tenture illustre le récit biblique du Second Livre de Samuel. En pleine guerre contre les Ammonites, le roi David s’éprend de Bethsabée alors que sa femme Michol est frappée de stérilité ; de cette relation adultère s'annonce une descendance. David envoie alors Urie, l'époux de Bethsabée, en première ligne du front, où il trouve la mort. La colère divine s'abat sur le couple et l'enfant décède. Après une période de repentance, le souverain pardonné remporte la victoire et épouse Bethsabée. De son union avec Bethsabée légitimée par Dieu naîtra Salomon, grand roi d’Israël.
L’histoire est transposée dans le cadre de vie du XVIe siècle, offrant une multitude de détails sur la vie de la cour à la Renaissance (costumes, apparat et cérémonial royal, art de la guerre). Le nom de l’artiste qui en a élaboré les cartons demeure inconnu. Il pourrait toutefois s’agir du peintre flamand Jan van Roome, dit Jean de Bruxelles, artiste en vogue à la cour de Marguerite d’Autriche, tante de Charles Quint. Jan van Roome dessine en 1513 le tombeau de son époux Philibert de Savoie à Brou, dont les statuettes s’apparentent de très près aux figures de la tapisserie. D’ailleurs, le nom le plus fréquemment suggéré lorsqu’on tente de considérer le commanditaire de cette oeuvre qui ne porte aucune armoirie est celui de Marguerite d’Autriche. Deux indices viennent conforter cette hypothèse : le motif héraldique du « A » sur le cheval porte-étendard de la troisième pièce, pouvant évoquer Austria, et l’architecture du palais de la quatrième pièce, qui est à rapprocher de la cour du palais ducal de Bruxelles, dont il avait dessiné la clôture.
Si Marguerite d’Autriche a commandité cette oeuvre, il semblerait qu’elle l’ait revendue avant sa mort, survenue en 1530. En effet, l’inventaire de 1547 du roi Henri VIII d’Angleterre signale l’achat en 1528 à un marchand flamand d’une tenture en dix pièces représentant « la riche histoire du roi David », aux dimensions similaires à celles de la tenture du musée national de la Renaissance.
Cette tenture met en scène l’orgueil et l’affront du roi David envers le pouvoir divin autant que le pardon et le consentement de Dieu. Il est donc aisé de comprendre la valeur qu’Henri VIII pouvait accorder à ce récit, dans un contexte où il cherchait à faire accepter par le pape son divorce avec Catherine d’Aragon - qui ne lui donnait pas d’enfant - et l’effet que pouvaient produire ces tapisseries sur les princes et ambassadeurs italiens lorsqu’elles étaient déployées durant les cérémonies du glorieux souverain.
Cette oeuvre n'est actuellement pas exposée pour des raisons de conservation.